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Dans
le contexte de la modernité, le territoire a été le plus souvent
perçu comme un ancrage duquel les artistes ont tenté de s'arracher,
afin d'embrasser les idéaux universalistes. Entre le besoin d'illustrer
leur culture d'appartenance et la dénonciation du culte rendu
à cette culture, ces derniers se seraient plutôt appliqués à émigrer
pour mieux se constituer. Ce mouvement centrifuge semble avoir
connu une certaine plénitude dans le contexte nord-américain où
le continent a été longtemps abordé comme un lieu de rupture,
de confrontation avec l'inconnu, mais également, de potentialité.
Suivant cette réalité, notre démarche de recherche consiste d'abord
à questionner la manière dont ce point de contact de l'individu
avec le territoire et l'altérité auraient engendré les différentes
cultures nord-américaines et leurs mythologies. Les études comparatives
menées notamment par les historiens Gérard Bouchard et Yvan Lamonde,
ainsi que par des spécialistes des études littéraires - comme
Maurice Lemire, Jean Morency, Jean-François Chassay ou Patrick
Imbert - nous ont récemment éclairés sur les confluences imaginaires
de l’expérience nord-américaine. Ces recherches ont alors permis
de surpasser la stricte question des contacts ou des influences
entre les créateurs états-uniens, canadiens et québécois. Ils
ont également fourni un terrain méthodologique fertile afin de
réfléchir sur les possibles incidences de ces imaginaires sur
le développement des arts visuels, sur la manière dont les créateurs
auraient transposé certaines données de cette expérience dans
le médium pictural, médium de prédilection de la modernité artistique
occidentale.
Au
cours des décennies 1910, à la veille de la Première Guerre mondiale,
au moment où le Canada visait une certaine autonomie par rapport
au pouvoir britannique et commençait à s’interroger sur son identité
nationale, les artistes du Groupe des Sept (dont faisait partie
Tom Thomson) représentaient le territoire en tentant pour la première
fois de lui insuffler une dimension culturelle, de le considérer
comme un des principaux déterminants de l'identité canadienne.
Ils
ont alors présenté la réalité territoriale essentiellement sous
les traits d’une nature vierge et nordique
Les
traits de nordicité avaient l’avantage de fournir un dénominateur
commun entre les provinces qui s’échelonnaient de l'Est à l'Ouest ;
et permettait aussi de marquer une distinction avec la réalité
états-unienne et britannique.
Alors
que les traits de virginité permettaient de niveler les
différences culturelles qui caractérisent la mosaïque canadienne,
comme l’avait souligné il y a quelques années mon collègue F-M
Gagnon.
Leurs
œuvres ont été récupérées au cours des années 1920 par le discours
nationaliste.
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