J'écris
ces lignes en écoutant Enrico Macias…
écho qui résonne
entre les parois de sable d'une identité mouvante
voix arrachée au silence
comme au pays,
son qui sourd de sous l'absence,
L'absence de quoi ?
L'absence de soi à une terre d'origine.
Je ne suis qu'une absence,
que la trace d'une présence passée qui ne
m'appartient pas, là-bas, de l'autre côté
de la Méditerranée :
- Tu es d'où ? (peau
brune)
- De France.
- Non, mais en vrai, tu es
d'où ? (cheveux noirs)
- Je suis née à
Paris.
- Oui, mais tes parents ne
sont pas de France… (nom pas français)
N'être plus que l'absence de sa terre.
Cette terre, nous y étions
étrangers indigènes, français naturalisés
pas naturels.
Ni les français du
dimanche ni les indigènes du vendredi.
Les autres, ceux du samedi
qui de toute façon
était un jour comme les autres.
Car la mezouza en mal de baisers
se reposait à l'intérieur de la maison
jamais dehors.
Et la kipa ne quittait le
placard que pour les soirs de fêtes
- Ta famille est arabe et
berbère ? Tu es de chez nous !
Un nom espagnol ? Tu es venue
avec nous ?
Je suis de ceux qui vinrent del Guadalquivir avec vous,
Frères du premier exil.
Deuxième exil : Crémieux,
expulsion morale
Sur le papier, déjà
plus indigènes,
En pratique, pas colons
Tatoués de nouveaux
privilèges, rendus étrangers à nos
frères
Renvoyés à la
mer entre les lèvres muettes de la Méditerranée,
d'abord dans l'esprit
de nos frères et de
nos nouveaux protecteurs,
Puis...
Dans le noir de la réalité sur laquelle on
a dû poser nos pieds :
- Français ? Levez
le camp ! Allez là-bas !
- Français ? Levez
vos pieds… noirs de là-bas !
… troisième exil
dont je suis le fruit.
Fruit qui s'exile, confortablement, loin de l'arbre de naissance
qui n'est pas l'arbre d'origine
à la recherche du seul arbre qui soit le sien, celui
qui plonge ses racines dans
l'étrangement : l'arbre créateur, l'arbre
littéraire.
Et une branche un jour s'est penchée sur le fruit,
Branche de repos, d'exil
Branche de POEXIL.
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